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Vous bénéficierez de la possibilité de lire l'histoire dans le bon sens. Nous continuerons à écrire ici un temps, mais uniquement pour ne pas vous dépayser trop vite.

Merci à Meianki pour la réalisation du site.

Enjoy !

lundi 2 novembre 2009

Arthus n'avait pas bougé...

Arthus n'avait pas bougé, et son état se dégradait sans cesse : sa respiration était sifflante, et il était inconscient. Alors qu'Elina arrivait près de lui, ses genoux lâchèrent et elle se rattrapa tant bien que mal à la palissade en s'écorchant le bras. Elle savait qu'elle n'aurait pas la force de repartir comme l'homme en bure le lui avait enjoint, meme en laissant le bandit ici...elle s'écroula à côté de lui, maudissant le sort qui la ferait mourir là, à quelques mètres à peine d'autres hommes qui avaient décidé que deux membres de leur espèce n'aurait pas le droit de survivre. Ses mains se mirent à caresser machinalement la poussière et les cailloux qui roulaient sous ses doigts. Elle regarda le ciel d'un bleu limpide... si chaud... Les détails du paysage commençèrent lentement à se brouiller alors que les minutes s'égrenaient.
Le sang se mit à cogner à ses tempes. Cela faisait quelques temps qu'elle n'entendait plus l'homme à côté d'elle... seul un sifflement sourd et désagréable lui tenait compagnie, mais elle n'aurait sû dire s'il venait d'un serpent ou de sa propre tête. Elina toussa. Elle avait de plus en plus de mal à respirer... bientôt son organisme refuserait de répondre aux injonctions paniquées de son âme.

Le temps passait, long et court à la fois... affreusement indéfini. Elina ne vivait plus que dans une bulle d'heures, de minutes et de secondes bleues et oranges. A moins que le ciel ne soit en réalité qu'une poussière azur qui s'écoulerait dans un sablier géant? Quel incroyable pouvoir que l'agonie... on devient alors éternellement éphémère. On aimerait et on souffrirait à la fois que cela dure et que cela cesse.

Elina ne pensait plus. Son corps trembla une dernière fois alors qu'une douleur fulgurante traversait son visage.
Puis tout devint noir.

Lorsqu'on regarde le royaume de Lynellis du ciel, comme seuls les Dieux et les oiseaux savent le faire, on ne peut manquer d'avoir l'oeil attiré par les créatures extraordinaires qui peuplent ce monde magnifique. C'est notamment le cas des Jilils, les animaux les plus rapides que la Terre aie enfanté. Oh, d'aucun les aurait confondu avec de stupides rongeurs, mais ces êtres exceptionnels possèdent en réalité une intelligence proche de celle d'un enfant de 10 ans. Capricieux et attachants, ils forment des animaux de compagnie très prisés ainsi que d'excellents messagers. Il n'est d'ailleurs pas rare d'en croiser sur les routes du Royaume.
A l'origine, les Jilils proviennent de l'Erg du coeur du royaume de Lynellis. On les aperçoit de loin, magnifiques fusées de poussière qui disparaissent avant même qu'un homme cligne des yeux sous le soleil brûlant. Alors que pour les énormes bipèdes la traversée de l'Erg se compte en semaines de chevauchée, pour les petits Jilils il n'est qu'un terrain de jeu traversé en quelques jours.
Pourtant, la réalité des Jilils apprivoisés est tout autre : abâtardis par les multiples croisements réalisés dans les élevages afin d'en faire des animaux de vitesse d'excellence, ces êtres furent rendus aussi idiots que de pauvres coqs de combat. Les courses de Jilils étant très en vogue en ces temps barbares, nombreux furent ceux dont l'intelligence consanguine ne fut pas suffisante pour les empêcher de mourir d'épuisement dans les arènes.

Elina rouvrit les yeux. Quand les avait-elle fermés? Le monde lui semblait maintenant bizarrement vertical, l'horizon avec son soleil déclinant traçant une ligne parfaite dans le centre de son champs de vision. Au milieu de cette ligne, une boule beige remuait légèrement. La jeune femme grogna et tenta de se lever, mais le contact rapeux du sable sur sa joue lui fit comprendre qu'elle avait glissé sur le côté. Depuis combien de temps était-elle ainsi? Elina accomoda difficilement sa vue et parvint enfin à distinguer plus précisément ce qui lui faisait face. C'était une sorte de petite souris beige doré aux larges oreilles qui se tenait dressée sur ses pattes arrières.
La femme et le petit Jilil échangèrent un long regard. Elina ne sû pas trop ce qu'ils s'étaient ainsi dit, mais l'animal se mit brusquement à siffler très fort et à creuser à une vitesse qu'Elina n'aurait jamais crû possible. Le Jilil creusait, creusait et en quelques secondes il s'enterra, rejetant la terre et la poussière loin derrière lui en continuant de siffler. Bientôt, un second Jilil apparû, en tout point semblable au premier et se mit à creuser lui aussi. Puis ce furent des dizaines de ces grosses souris des sables qui se mirent à la tâche sans qu'Elina ne comprenne pourquoi. Alors que son esprit recommençait à divaguer dans le crépuscule, le sol s'écroula brusquement sous elle. Elle poussa un croassement rauque et ne pensa qu'à se protéger les yeux.

Elina tomba de quelques mètres. Lorsqu'elle parvint à se redresser, elle se découvrit dans un souterrain frais et sombre. Plus de soleil, plus de chaleur... quelque chose d'humide fut déposé dans sa main.
C'était une poire un peu écrasée dont le précieux suc coulait sur le sol.

dimanche 25 octobre 2009

Kech'er se réveillait ...


Kech'er se réveillait à présent. Sa conscience divine reprenait doucement de sa vigueur alors que son omniscience lui revenait peu à peu . Un par un, ses sens divins s'imposèrent à lui, et le réveil du Dieu, pourtant quasi-instantané à son échelle, prenait, à l'échelle de Gaïala, des semaines entières. Un doute le traversa alors que les minuscules consciences humaines et leur pensées finissaient par lui parvenir. Leur calendrier avait atteint une date qu'Il pensait devoir arriver dans plusieurs siècles seulement et ce qui se rapprocha le plus du sentiment de peur humain se trouva confirmé quelques instants plus tard alors qu'Il consulta l'état de ses Puissants Alliés au sein du camp du Chaos. Aucun d'entre eux n'étaient en Etat d'Eveil, la seule phase du cycle des Dieux qui leur permettait d'avoir une quelconque action sur l'Humanité. Il consulta ensuite grâce à ses pouvoirs l'état de ses ennemis du Camp de l'Ordre et remarqua que la plupart d'entre eux était pleinement Eveillés, notamment sa soeur Ashaya, qui s'était joué de lui d'une manière qu'il ignorait encore.
Avec regret il constata qu'un de ses membres était passé du côté de l'Ordre pendant son sommeil et se maudit (ce qu'il trouva lui-même assez ironique pour une divinité) du fait que les Dieux soient soumis aux même règles que les humains.
Il était maintenant parfaitement conscient et sa capacité à entendre les âmes mortelles était totale. Le bruit, sourd, des milliers de créatures pensantes du Monde de Gaïala le fit frissoner de plaisir. Cette intrusion aurait pu sembler désagréable à n'importe quel humain, pour autant c'était la raison de vivre des Dieux. Ecouter et Répondre. Dans la mesure du possible évidemment. Les lois divines étaient telles que les Dieux ne pouvaient pas influer directement sur les êtres, mais seulement les guider, leur montrer le chemin. Pour lui, c'était celui de la Liberté.

Il choisit de se concentrer sur ses fidèles émissaires gaïaliens, ceux qui résidaient sur l'Ile D'Or. Ces créatures avaient compris sa conception de la Liberté et le servaient depuis presque la création de leur monde. Ce groupe de personnes hétéroclites, bien que peu nombreux et aux moeurs très différentes des autres êtres, lui était entièrement dévoué, et c'était un grand atout pour le Dieu car par leurs actes, ils exécutaient virtuellement toutes ses volontés, notamment grâce à la connexion particulière que le Dieu avait avec son Grand Prêtre. Ce lien était si intense que l'aura divine était communiquée au simple mortel, imposant respect et écoute à tous ceux à qui il s'adressait.
Cependant, le sommeil du Dieu avait gravement endommagé les capacités prophétiques du mortel, il pouvait le ressentir. Ashaya en était en partie responsable. Elle avait efficacement profité de l'absence du Dieu du Chaos pour brouiller la vision de ses protégés, leur faisant amener de faux émissaires sur l'Ile d'Or. Des Emissaires d'Ashaya !
Il devait accorder à sa divine soeur un certain talent de stratège. Il ne savait pas exactement comment elle s'y était prise, mais le retard dans l'Eveil du Dieu de la Liberté lui avait conféré une avance non négligeable dans sa tâche de l'Ordre. Mais Kech'er n'était pas à court d'idées. Au contraire, ce handicap ne le motivait que d'avantage.
Il commença par réveiller tous ses Alliés du Chaos, un à un, et leur esprit se connectèrent peu à peu au sien.

Le Jeu pouvait enfin débuter.

samedi 10 octobre 2009

Ils étaient aux...



Ils étaient aux pieds de la palissade et rien ne semblait avoir bougé depuis le moment où elle avait aidé l'homme à se lever pour la suivre. Elle jeta un rapide coup d'œil à Arthus, il était livide et sa bouche se tordait en un rictus de douleur mais il avait cessé de gémir après qu'elle l'ai menacé de l'abandonner.
"Le calme avant la tempête" songea-t-elle.
Le poids de l'homme sur son épaule commençait à la faire souffrir. Elina se dégagea sans douceur, provoquant une plainte à peine audible de la part du blessé qui s'adossa à la palissade du mieux qu'il pu.
Dans d'autres circonstances elle aurait été prise de pitié pour l'homme qui l'accompagnait, mais elle n'en avait plus la force. De toute manière il n'en avait éprouvé aucune envers elle dans la forêt quand il l'avait dépouillé de son bien le plus précieux. Elle frotta son épaule endolori et s'éloigna chercher l'entrée sans plus un regard pour Arthus.

Elina ne mis pas longtemps à atteindre l'entrée des fortifications. Le silence qui régnait dans ces lieux était étrange, presque irréel.
"Ohé !" Sa gorge était sèche et lui faisait mal.
"Ya quelqu'un ?" Ses cris ressemblaient plus aux plaintes d'une enfant geignarde qu'aux injonction d'une adulte.
"Ouvrez moi, je vous en prie !"
Elle frappa de ses poings contre les deux battants qui s'obstinaient à rester clos. Elina sentait la vie de l'autre coté, elle pouvait imaginer les corps prostrés dans l'attente que ses cris cessent. Elle entendait les bruits furtifs de leur vie silencieuse. Mais rien. Découragée, elle se résigna à faire demi tours.
"Attend !"
L'homme qui l'interpelait devait être perché sur une échelle car il était visible malgré la palissade. Il était vêtu d'une simple bure rouge et la capuche relevée ne laissait pas voir son visage.
"Tu es femme, aussi te laissons nous la vie sauve. Retourne d'où tu viens et emporte ton imprudent. Peut-être retiendra-t-il la leçon qui aura couté la vie de ses compagnons : quiconque défie les enfants de Kech'er se voit transpercé en retour."

La jeune femme avait soif et ses pensées étaient de plus en plus désordonnées. Il fallait qu'elle se concentre sur chacun de ses gestes pour avoir une chance de survivre. Pour rejoindre l'homme qui dépendait d'elle maintenant.
"Ashaya..." Ses prières n'étaient que murmures dans l'immensité du désert de pierres. Elles se heurtaient à la palissade que la jeune femme longeait maintenant en sens inverse.

dimanche 4 octobre 2009

Elina sursauta...



Elina sursauta et se recula. Une bouffée de colère la submergea, lui donnant des idées folles sur ce qu'elle pourrait infliger à cet homme qui avait servi d'exutoire à sa peine et sa haine pendant cette dernière semaine de torture physique. Elle pourrait le bourrer de coups de pieds... ou bien le frapper. Mais la colère d'Elina retomba bien vite, car elle ne pourrait rien faire de pire que ce qu'il endurait déjà...Ah ! Que n'était-il misérable, ainsi étalé sur le sol avec cette hampe de flèche brisée dans le flanc! Il n'avait eu que ce qu'il méritait, il mourrait là comme le chien qu'il était!

Les yeux d'Elina se mirent à fouiller le corps de l'homme des yeux. Elle se souvint brusquement de son nom, qui lui échappait depuis quelques jours... Arthus. Mais une autre priorité que la vengeance s'imposait dans son esprit: si seulement il avait eu une gourde ! Elle pourrait soulager la soif qui lui brûlait la gorge de milles traits brûlants depuis l'aube. Mais il ne semblait rien porter d'autre que ses vêtements déchirés et imbibés de sang, et les cadavres alentours ne valaient pas beaucoup mieux. La mort environnante ne la rebutait même pas, tant sa fatigue écrasait ses sentiments. Elle analysait tout froidement : le massacre avait dû être perpétré quelques heures plus tôt seulement, car les mouches commençaient à peine à venir se poser sur les plaies béantes et encore humides. Ici, un cheval gisait, la bouche béante et les yeux révulsés en une ironique parodie de ces humains qui ne respireraient jamais plus. Elle fouilla quelques sacs qui trainaient, éventrés et déjà visiblement fouillés. Pas une trace d'eau; c'était apparemment la denrée la plus riche que ces bougres transportaient, ou bien ... le seul salut des survivants.
Le brigand poussa encore un râle, odieux aux oreilles d'Elina qui fit une grimace, fendant sa lèvre. Ce grognement lui rappelait que cet Arthus était toujours mourant et même si elle ne le portait pas dans son coeur, son agonie restait affreuse à contempler.
Elle s'approcha de nouveau, hésitante, ne sachant que faire. L'homme tendit vers elle une main tremblante en murmurant « ma dame...de l'eau... » d'une voix rendue rocailleuse par la soif. Son geste permit à Elina d'entrapercevoir son propre médaillon, qu'il osait porter à son cou! Elle se pencha vers lui, attrapa la chaine d'un mouvement vif et la lui arracha, provoquant un geignement pathétique.
La peau moite de sueur d'Arthus avait collé la poussière sur ses traits, et ses yeux papillonnaient pour chasser les larmes que la douleur des rayons du soleil infligeait à sa vue. Ses lèvres semblaient encore plus sèches que celles d'Elina. L'homme souffrait de sa blessure, mais elle était loin d'être fatale. La flèche était enfoncée dans son flanc gauche et il avait saigné raisonnablement mais il semblait loin d'en mourir: la soif s'en chargerait.
Le regard d'Elina erra alentour et s'accrocha sur le disque brillant, réveillant sa curiosité. Elle fit mine de s'en approcher, mais Arthus tendit soudain la main en un sursaut pour tenter de l'attraper, échouant lamentablement. Le mouvement voué à l'échec sembla en revanche avoir ravivé sa douleur, car il se tordit derechef en hurlant. Elina ramena calmement une de ses longues mèches collées derrière son oreille. Elle avait pris une décision. Cet homme lui avait laissé la vie sans son bien, elle en ferait de même.
Elle se saisit du disque de métal et le rangea dans sa besace, sous ses vêtements sales de tous ces jours de voyage. Puis elle agrippa sous le bras du côté valide l'homme toujours hurlant, le faisant asseoir puis se mettre debout avec force cris. Lorsqu'il tint enfin appuyé sur l'épaule d'Elina, tremblant et suant à grosses gouttes à la limite de la conscience, ils entreprirent quelques pas lents et difficiles vers la silhouette de la palissade maintenant distincte. Elina sourit à travers ses mèches folles. Au point où elle en était, cet homme désormais à sa solde ne serait pas de trop.

vendredi 2 octobre 2009

Sa langue passait ...



Sa langue passait sans arrêt sur ses lèvres pulpeuses mais desséchées, essayant de réhydrater une zone de son corps qui lui indiquait sans arrêt la situation d'urgence dans laquelle elle se trouvait.
L'eau se faisait rare désormais, et c'était encore un écueil qu'Elina avait omis d'envisager avant cette excursion. Serait-ce la dernière erreur qu'elle commettrait ? Elle le redoutait. Le rationnement de son eau lui avait déjà permis de tenir de nombreux jours supplémentaires alors que la soif la tiraillait déjà, mais désormais, ses heures lui étaient désespérément comptées.
Alors qu'elle avait terminé la traversée de la Forêt Frontière, elle avait ressentit le changement de climat, qui s'était fait plus rude, plus sec, et la marche moins aisée. Un jour à peine avait passé alors qu'elle laissait la lisière de l'immense forêt derrière elle, et l'ombre apaisante des feuillages avait laissé place à un soleil implacable et asséchant.
Les trois jours suivant, elle avait réussi à survivre grâce aux quelques baies et à l'eau qui lui restait mais les premiers effets de la chaleur combinée à la fatigue l'avait grandement affectée et ses côtes saillantes en était la preuve s'il en fallait.

Celà faisait maintenant cinq jours qu'elle errait au sein d'un paysage qui oscillait entre désert rocailleux et sols terreux fracturés en polygones de dessications, aux formes aussi variées que les rares nuages qui traversaient le ciel d'un bleu azur. Elle mettait un pied devant l'autre, chacun de ses pas épuisant un peu plus son espoir. Un instant, elle crut que ses yeux lui jouaient un tour lorsqu'elle aperçut un relief qui n'avait rien de naturel, loin devant elle. En se concentrant quelques secondes, elle arriva même à déterminer qu'il s'agissait d'une palissade, qui devait probablement servir de protection de fortune pour un village, où elle pourrait enfin s'abreuver.

Alors qu'elle accéléra le pas, trouvant une force qu'elle n'aurait cru avoir quelques minutes plus tôt, un rayon lumineux vint heurter son oeil droit, l'éblouissant et la déstabilisant pendant quelques instants. Elle chercha l'origine de ce rayon de lumière et, lorsqu'elle la localisa enfin, elle remarqua qu'il provenait d'un petit disque réfléchissant, qui se trouvait à côté d'un ensemble de rochers sombres, qui se détachait nettement au niveau de l'horizon.
En se rapprochant, elle remarqua avec horreur qu'il ne s'agissait en aucun cas de rochers, mais bien de silhouettes, qui gisaient là, et que certains même avaient été fléchés. Elle s'approcha de l'individu le plus proche du disque réfléchissant et détecta un mouvement et un léger râle. Elle retourna l'homme, allongé face contre terre, pour découvrir un visage horriblement familier. Un visage chauve traversé par une large cicatrice.

mardi 15 septembre 2009

"Viens, sèche...



"Viens, sèche tes larmes et suit nous."
Le garçon lui tendit une main que Piou regarda avec réticence, elle fit glisser un mèche rebelle derrière son oreille et se résigna à l'attraper. Il serait toujours temps de lui demander des comptes plus tard. Qu'importe son horrible geste envers l'animal, elle avait besoin de la chaleur qu'il lui offrait.
"Tu es nouvelle ici ?
- Je veux rentrer chez moi...
- Tu viens de l'Extérieur c'est ça ?
Voyant que la fillette ne répondait pas, il haussa les épaules et entreprit de repartir. Piou s'agrippa, bien décidée à ne pas rester seule à tourner en rond en attendant les adultes. "Ne bouge surtout pas" avait intimé la Reine. Elle hésita une fraction de seconde mais fit glisser ses pensées d'un geste décidé.

Sourcil-Bijoux se déplaçait rapidement et la petite devait faire des efforts pour suivre le rythme de ses grandes enjambées. Elle était concentrée sur ce grand gaillard mystérieux qu'elle guettait du coin de l'œil. Il était beau malgré les étrangetés de son visage. Et il avait l'air courageux aussi. Le petit frère gambadait devant et Piou se demanda quel pouvait être son nom. Finalement la vie n'était pas si nulle et elle s'autorisa un sourire.

"Attention !"

Piou trébucha sur le nid de poule et s'étala de tout son long. C'était trop injuste. Elle aurait voulu retenir ses larmes mais le découragement la submergea et elle éclata en sanglots. Enfin.
"Ou est ma maman ! J'en ai marre... Je veux rentrer à la maison, ou est ma maman ! Ou est-elle ? J'en ai marre, j'en ai marre... Et le papillon, pourquoi tu l'as tué ? Hein ? Pourquoi !" La détresse fit bientôt place à la colère et la petite se releva furieuse. "Pourquoi personne n'est gentil ici ? Pourquoi personne ne me parle ni ne me souris ? C'est quoi vos têtes de vieux schnoque et pourquoi tu l'as tué bordel de cul de poule errante? J'en ai marre !"

Le petit galopin s'était arrêté pour l'observer ahuri. Le grand aussi. Les vêtements de Piou n'avait pas grande allure, son visage était rouge et barbouillé par les larmes mais ses yeux lançaient des éclairs qui les dissuadèrent de se moquer. La petite était perdue dans sa fureur et les deux garçons ne soufflait mot devant cette explosion inattendue.

"POURQUOI TU L'AS TUÉ ?"

Piou était dressée devant Sourcil-Bijoux, de toute sa petite hauteur, elle le regardait droit dans les yeux plus déterminée que jamais à obtenir des réponses à ses nombreuses questions. Celui-ci soutient son regard un temps puis posa un genoux à terre. Il lui pris une main qu'il caressa doucement, elle n'était plus qu'un animal blessé, il le sentait.

"Connais-tu l'histoire d'Ashaya ?" Il n'y avait aucune compassion dans sa voix, juste du respect. Il n'était qu'un garçon souhaitant dispenser son savoir et qui lui parlait d'égal à égal.
"Nul papillon ne vient jamais sur nos terres si ce n'est pour espionner les nôtres. Tout le monde sait qu'ils sont envoyés d'Ashaya pour nous corrompre, pour manger le cœur pure des enfants et les aliéner alors...
- Je ne comprends pas ton langage, tu parles pire que les moines ! Je connais Ashaya, maman m'a raconter son histoire et chaque jours je prie pour elle. Ses envoyés sont des cadeaux qu'il faut chérir. Si ma maman t'avait vu elle t'aurait...
- Des cadeaux ?! Ashaya ne cherche qu'à nous prendre nos libertés, à rendre la vie ennuyeuse et c'est vers elle qu'on envoi les enfants incapables de..."

Horrifiée, Piou regardait ce garçon proférer les pires inepties, il bafouait sa déesse, il la déchirait, il déblatérait des horreurs à son sujet avec l'air le plus sérieux du monde. Lui qu'elle trouvait pourtant si beau. Et c'est seulement en voyant un minuscule papillon virevolter derrière le gaillard outrancier qu'elle compris. "Je ne dois pas lui casser la gueule, il s'est juste trompé. Je dois aider les papillons à sauver les garçons. Je dois aider les papillons. Je dois sauver Sourcil-Bijoux. Et son petit frère aussi..."

jeudi 3 septembre 2009

Les ailes diaphanes...

Les ailes diaphanes d'un beau bleu pâle s'ouvraient et se fermaient lentement, comme si le ciel entier avait décidé de s'incarner dans ce petit animal. Des moutonnements blanc ornaient la frange des ailes et chose étrange, le corps de l'insecte était lui-même blanc et légèrement transparent.
La tête entre les mains, battant de l'air avec ses jambes au même rythme que le papillon, Piou observait avec émerveillement l'insecte se sécher les ailes. Après de longues secondes de contemplation, elle en était parvenue à la conclusion qu'il ne pouvait être qu'un émissaire d'Ashaya. Certes, dans les légendes ils disent que ce sont plutôt les chats ailés, mais Piou ne voyait pas pourquoi ça ne pourrait pas etre également des papillons blancs et bleus. Elle était dévorée par l'envie de dire à sa maman qu'elle avait découvert une nouvelle sorte d'émissaire, mais Elina n'était pas ici...

Le regard de Piou se fit absent. Gaby était très gentil, il l'avait toujours été. La reine était gentille aussi... mais elle ne voulait pas jouer avec elle. Elle ne s'occupait pas de Piou, et elle lui avait même dit d'arrêter de courir partout. Heureusement qu'il y avait ce papillon, parce que sinon elle s'ennuyerait beaucoup.
Piou avança tout doucement son doigt du papillon. Elina lui avait toujours dit que les papillons étaient comme les flocons de neige : si on les touchait, ils mouraient. Pourtant ces ailes étaient si belles... elles devaient être si douces ! Quel malheur de ne pas pouvoir les toucher rien qu'une fois...
Soudain, alors qu'elle pensait pouvoir au moins faire grimper l'animal sur son doigt, une chausse de cuir beige vint s'écraser brutalement sur le papillon et l'écrabouilla consciencieusement.

Piou se dressa sur ses pieds, horrifiée.
« Mais qu'est ce que tu fais !? Tu as tué le papillon ! »
Elle était face à un jeune garçon d'environ 12 ans, affreux, comme ils l'étaient tous ici : ses sourcils étaient rasés, remplacés par de fines lignes de bijoux colorés, incrustés dans sa peau. Il était accompagné d'un autre garçon qui devait avoir l'âge de Piou, plus jeune, dont le visage était intact. Les deux garçons avaient un vague air de ressemblance que les sourcils-bijoux du plus vieux venaient casser assez remarquablement.
Tous deux restaient impassibles, et quand le plus âgé eu fini de s'assurer qu'il avait bien tué l'insecte, ils firent mine de repartir.
Mais Piou n'en avait pas décidé ainsi : folle de rage, elle les suivi en les insultant avec tous les gros mots qu'elle avait pu apprendre pendant sa courte existence -et cela représentait un paquet de vocabulaire-.

« EYH ! Tu m'écoutes?! Tui n'es qu'un batard de phoque des plages! Ta mère t'a fait avec une pieuvre! Tu va payer ! »
Elle se jeta sur le plus vieux en le bourrant de coups de poings en criant, et rapidement les larmes lui vinrent aux yeux, car les jeunes continuaient d'avancer, le plus jeune se retenant carrément de sourire.
Enfin, Piou vaincue par ses propres larmes s'arrêta sur le chemin herbu en sanglotant.
« Le pauvre papillon... il ne t'avait rien fait ! Pourquoi tu l'as tué! Oh, pauvre papillon...! »
Elle ferma les yeux en se berçant de ses propres bras. Elina lui manquait tellement ! Elle voulait sa mère, mais elle était loin, où était-elle?
Ses hoquets n'avaient toujours pas cessé quand elle senti une main chaude se poser sur son épaule. Lorsqu'elle ouvrit les yeux, elle découvrit le visage de Sourcils-bijoux, qui lui souriait largement.